Historique • 1997 HISTOIRE DU MEMORIAL par Roy Crane.

LE MONUMENT PRINCIPAL

En 1987 Denis Sweeting DFC, de I’escadrille Typhoon 198, a eu le premier l’idée d’un Mémorial pour les pilotes tués durant les batailles de Normandie, en discutant en Juin avec le Général Paul Ezanno DFC and Bar, CdeG, qui avait été le commandant de l’escadrille 198 pendant la campagne de Normandie. On en discuta aussi avec plusieurs Maires et notables, sans que cela ne suscite beaucoup d’intérêt, au vu des problèmes financiers que cela pourrait soulever. Pendant ce temps là, Monsieur Jacques Bréhin avait formé une association qui s’occupait d’extraire du sol des épaves de Typhoons et d’organiser la sépulture de pilotes de Typhoons avec les honneurs militaires. Les raisons de son intérêt pour le Typhoon remontent quand Jacques Bréhin était encore un jeune garçon un mois avant son onzième anniversaire, après quatre ans d’occupation ennemie, le 7 juin 1944 (D-Day + 1) il vit de ses yeux un Typhoon de la RAF touché par la DCA près de Villers-Bocage. Jacques Bréhin vit le pilote sauter en parachute et entendit I’appareil s’écraser sur un terrain de la ferme de ses parents et y exploser. Ses parents lui dirent que le pilote avait été sérieusement blessé. Un soldat allemand l’avait rapidement découvert mais, au vu de son état,l’avait abandonné à son sort. Dans les environs, des familles françaises firent ce qu’elles purent pour le pilote blessé qui avait atterri sur le terrain de la ferme de Monsieur Lemenuel, locataire du Baron d’Huart, ce dernier étant également de la terre louée par les parents de Jacques.

Cet événement est devenu un des éléments-clé de ce projet de Mémorial. Un souvenir très vif qui a fait naître chez Jacques Bréhin une fascination pour le Typhoon et ses pilotes. Jacques est devenu technicien agricole, tout en gardant une activité agricole avec son épouse et sa famille, à Vendes, près de Tilly sur Seulles. Au début de 1969, Michel, le fils de Jacques, à qui son père avait beaucoup parlé de la guerre pendant son enfance, s’est rendu avec sa grand-mère sur les lieux où I’avion s’était écrasé en 1944. Cela a réveillé dans la famille un nouvel intérêt pour le Typhoon. En grandissant Michel s’est de plus en plus passionné pour le rôle joué par les Typhoons, au fur et à mesure que son père lui en parlait. Finalement, Jacques et son fils revinrent sur le site au début de 1984 pour sortir du sol ce qui restait de I’appareil du Lieutenant Peter Roper. Plusieurs composants de l’appareil furent alors récupérés, dont le moteur, qui a été transporté au musée de Tilly sur Seulles. Ces expériences ont amené Jacques Bréhin à discuter en fin 1987 avec le Général Paul Ezanno, de son idée d’un Mémorial pour les pilotes de Typhoon. Le général Ezanno a expliqué à Jacques Bréhin qu’il avait déjà abordé le sujet avec Denis Sweeting, mais que leurs contacts avec différents Maires et notables avait été infructueux, pour des raisons financières.

A la suite de ces discussions, cependant, M. Bréhin a contacté Monsieur Raymond Triboulet CBE, ancien Ministre du Général de Gaulle et membre de la Résistance pendant la guerre, et maintenant Président du Comité de Débarquement. Ce comité contribue à la construction et à l’entretien des Monuments commémoratifs de la Bataille de Normandie. Après avoir expliqué son idée à Monsieur Triboulet, on lui a demandé à quel type de construction il pensait. Jacques a alors montré un dessin représentant un grand monument rectangulaire. Monsieur Triboulet a pris un crayon et a dessiné trois larges flèches pointant vers le ciel en disant avec quelque vigueur: « Voilà ce qu’il vous faut et je vous aiderai à le financer ». Fort de ce soutien Jacques Bréhin a pris contact avec un certain nombre de marbriers pour finalement choisir Charles Le Baron, artisan-marbrier. Il donna un devis de 293.984,75 FF. Fidèle à l’image que j’ai donné de Jacques Bréhin, celui-ci dit, sans hésiter : »Allez-y ! « . Le Mémorial serait construit en granit fin du Zimbabwé, sur une base de granit bleu-perle de Bretagne. M. Bréhin a aussi contacté à cette époque Denis Sweeting pour qu’il l’aide à se procurer une liste des pilotes de Typhoons tués pendant la Bataille de Normandie entre Mai et Août 1944. il obtint cette liste après une longue recherche. La construction du Mémorial a commencé au début de 1989. Où allait-il se situer? M.Bréhin s’est mis à la recherche d’un lieu approprié. Jusque-là on s’était accordé sur Falaise où de si dures batailles eurent lieu, où les Typhoons se sont trouvés engagés contre les divisions blindées allemandes, avec de lourdes pertes de chaque côté. Ce site souleva tellement de difficultés que M.Bréhin ne put en venir à bout. On a avancé bien des raisons, pour tout dire ce fut impossible. Le 7 juin 1989, alors que nous assistions à d’autres cérémonies enNormandie, Jacques Bréhin nous amena sur un autre site, à Aubigny, près de Falaise. Cela ne convint pas non plus … L’autre site envisagé par M. Bréhin était Villers-Bocage, qui fut aussi le lieu de terribles engagements dont un bombardement par 400 Lancaster, en plein jour,à basse altitude, juste après le D-Day. Cela ne fut non plus pas possible, de plus le site ne convenait guère. La recherche s’est poursuivie vers Noyers-Bocage, situé sur la N.175 en provenance de Caen. Là, bien que le village ait été complètement détruit, le maire Monsieur Roland Heudier et la communauté locale, donnèrent un accord inconditionnel. Une parcelle de terrain idéal fut donnée par le village, à la jonction de deux routes au sud du village reconstruit, à quelques encablures de la belle église. L’érection du Mémorial sur ce site a commencé au début 1990 et il a été achevé juste avant le 46ème anniversaire du D-Day, le 6 juin 1990. L’inauguration du Mémorial a eu lieu le 9 juin 1990. Une messe a d’abord été célébrée dans l’église de Noyers-Bocage. Plusieurs dignitaires y assistaient appartenant à l’aviation alliée. Il y avait le Général Ezanno, Monsieur Raymond Triboulet, Monsieur Heudier Maire de Noyers-Bocage, Monsieur Jacques Bréhin, des proches des pilotes qui ont pu être contactés et des pilotes venus du monde entier. L’attaché parisien de Ia RCAF a fourni une garde d’honneur .Des centaines de personnes de la communauté locale ont aussi participé à l’événement. Après le dévoilement du monument, 151 colombes, symboles de paix, se sont envolées. On a déposé beaucoup de gerbes autour du Mémorial. Le marbrier, Charles Le Baron, qui assistait à la cérémonie, n’avait jusque-là pas reçu un centime pour son travail. Jacques Bréhin, de son côté n’avait encore rien reçu de l’aide promise par le Comité de Débarquement, sans doute parce que l’autorisation manquait pour la totalité de la somme impliquée. Jacques Bréhin avait de nouveau mis toute sa persuasion pour que le travail soit fait. Il était certainement l’objet de beaucoup de pression de la part de Monsieur Le Baron, allant jusqu’à mettre sa propre maison sur la balance. Les premiers dons ne furent pas versés avant le 3 Août 1990, ce qui permit à Jacques Bréhin de faire son premier versement à M. Le Baron le 24 septembre 1990. En Décembre 1992 nous devions encore 100.000 FF pour le Mémorial déjà construit. Nous avons renouvelé nos demandes pour des dons. Les Canadiens André Lord et Ken Chad Hanna DFC, Denis Sweeting DFC et I’auteur, des Australiens, Bergy Bergman KCVO, VL, KDFC, CdeG, Hollandais et Seymour « Buck » Feldman DFC, des USA ; tous ont joué un rôle essentiel ; la plupart d’entre eux étant des anciens pilotes de Typhoon qui ont été très généreux. M. Raymond Triboulet, Madame Marianne Gibert et le Général Paul Ezanno ont aussi contribué par des sommes importantes. La pression pour obtenir un financement s’est poursuivie toutes les années suivantes. Le 12 mars 1993 le versement final de 100.000 FF a été effectué pour payer le Mémorial.

 

LISTE DES PILOTES TOMBES AU CHAMP D’HONNEUR

Pendant une de mes nombreuses visites en Normandie avec mon fils Eric, nous avons eu une autre réunion avec M. Bréhin et le Père Yves Delouche notre interprète habituel. Nous avons longuement discuté avec Jacques Bréhin son voeu d’ajouter une plaque où figureraient les noms des pilotes tombés en Normandie au monument existant. Le monument n’étant pas encore payé à l’époque on a envisagé un support plastique, mais le projet a été rapidement abandonné. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait que le support serait du même granit que le monument, fin et noir sur une base de granit bleu perle. M. Bréhin, de nouveau, choisit M. Le Baron, non seulement pour la qualité de son travail, mais parce que nous lui devions encore beaucoup d’argent. Le projet présenté s’harmonisait parfaitement avec le Mémorial déjà construit. Le travail a commencé pour la liste au début de 1993, coût de I’opération : 185 550 FF. Lors d’une visite en Novembre 1993 nous avons rendu visite au marbrier et contemplé son laborieux travail: ciseler tous les noms dans un marbre poli et remplir les lettres d’une feuille d’or de 22 carats. Le premier paiement pour la Liste des Pilotes a été fait en juillet 1993. Fin février 1994, 80.000 FF avaient été versés, laissant encore 105.550 à payer. Le laborieux travail de la gravure de 3874lettres sur la plaque de marbre continuait et l’on allait poser les feuilles d’or. En mars 1994 l’excavation et la pose des fondations de la Liste des Pilotes a été effectuée par M. Le Baron, travail achevé en mai de la même année. L’inauguration de la Liste des Pilotes tombés au Champ d’Honneur a eu lieu le 8 juin 1994. II y eu d’abord la célébration d’une messe par le abbé GUILLAUMIN curé de la paroisse ,

secondé par le Père Yves Delouche qui a également assuré les traductions.

Etaient présents les dignitaires de l’Armée de l’Air française, de la Royal Air Force,

Monsieur Raymond Triboulet C.B.E. et ancien ministre, Monsieur Raoul HEUDIER Maire

de Noyers-Bocage, le Général Paul Ezanno DFC and Bar, CdeG, Monsieur Jacques Bréhin,

Président de I’Association « Pour le Souvenir des Ailes de la Victoire de Normandie » dont le dévouement et la détermination ont rendu tout cela possible. Plusieurs gerbes furent déposées

sur le Mémorial et sur le monument de la Liste des pilotes tombés au champ d’honneur. Très émouvante cérémonie et grand hommage rendu aux 151 pilotes de Typhoon qui ont donné leur vie.